Les mots surlignés font l'objet d'une note
1Monsieur, encores que par nous dernières letres ayés
2peu entendre nous misères et calamittés que
3sont bien grandes, si est ce que la urgence
4des affaires nous contraint encores vous
5faire ceste presente aux fins de vous remonstrer
6comme, suyvent ce que monseigneur de Gordes a
7escript par ses dernières letres, il a reduit
8la compagnie de monsieur de La Sallette à
9cinquante hommes que a faict coucher sur lestat
10comme bien estes adverti, que semble si la
11neccesité nous pressoyt mestre nombre suffizant
12pour la garde du lieu, veu mesmes que
13il y a beaucoup de pouvres garsons du lieu
14qui nestant entretenus, seront contraintz sen
15aller, nayant autre moyen de vivre et
16sont braves souldardz ausquelz y a plus
17aussi que lennemy se fortiffie tousiours plus
19fort, car toutz les souldardz, tant dycy que
20des autres garnisons circumvoysines quont estés
21cassés durant la trève ; se sont presque
22toutz allés rendre à lennemy et fest de tant
23[v] fortiffié et nous affoiblis ; et dailheurs que
24à Sere se font quelques pièces et en y a jà
25en estre que nous faict doubter que ne soyt
26pour nous comme nous menassent à la
27première commodité du temps, quest la cause
28que vous en avons volu advertir, affin dy
29pourvoyr de bonne heure à ce que le repentir
30ne fut trop tard ; davantaige, creignant que
31largent ne viene de moys en moys pour
32poyer les souldardz que seroyt notre toutalle
33ruyne pour navoyr moyen sans estre
34payés leur pouvoyr fornir advivres ne
35rien prester avant la main, attendu
36lesterilité de lannée, brulement des grains
37et perdition de notre bestailh et nouriage
38quil vous plaise moyener que le
39commissère viene avec argent pour faire la
40monstre chacun moys, ou bien adviser sil
41y auroyt moyen fère que là où ledit poyement
42ne viendroyt chacun moys, quil fut promis
43à mondit sieur de La Sallete, lever les contributions
44des villages comme ilz faisoyt auparavant
45et neaulmoingz, que encore [ajouter : que] ladite compagnie
46[212] fut payée par ledit comissaire, quil fut aussi permis
47contraindre lesdits villages chacun pour sa ratte
48advivres pour argent pour ladvituelhement
50du lieu, afin de ne tomber en neccessité de
51advivres, car nous en avons assés fort peu,
52de façon que ny estant pourveu de bonne
53heure et pendent que le temps le permet
54seroyt à creindre den tomber en une grande
55extremité, à quoy vous prions pencer et y tenir
56la main, car aultre moyen navons faire
57venir advivres en ce lieu, estantz ainsi
58parquetz de lennemy, si bien quil ny a
59pièce de nous circumvoysins qui ausasse à
60apporter ycy ung euf à vendre , de crainte
61de lennemy silz ne sont contraintz de ce
62faire par exprès commandement de mondit seigneur
63de Gordes, auquel vous prions remonstrer
64toutes ces choses et autres que congnoystrés
65pour notre soulagement, car touchant
66à nous, ayantz faict manger à bon compte
67nous bledz aux souldardz, serons contraintz
68en achepter bien cher pour nous familhes
69si sen peult trouver encores en y aura beaucoup
70[212 v°] des habitantz de ce lieu que avant que sout
71peu de jours, seront contraintz sen aller et
72quicter leurs maysons pour aller alheurs
73cercher advivres, nayant du tout point ne
74moyen den gaigner ne soy pouvantz travailher
75autant quil nya autres bledz à reserve en granier
77ycy que les vies sil vous plaisoyt envoyer
78à messieurs d’Aiguebelle vous nepveuz den
79bailher ce pendent pour argent au pris que
80court à ceulx quont chez eulx les souldardz
81pour leur faire du pain, seroyt ung grand
82soulagement aux pouvres hostes et contentement
83ausdits souldardz ; et neaulmoingz que leur
84pleust de nous supporter pour ceste année
85quelques restes de deniers que la ville
86en commun et en particulier leur doybt pour
87vente de bledz de lannée passée, vous serons
88tousiours de plus en plus tenus et redevables,
89car chacun a faict tout ce qu’a esté poussible
90den payer une partie à Claude qui nous
91presse du reste chose à nous impoussible,
92sil en se veult payer de prés et prés,
93[213] que faict vous supplier davoyr compassion
94de nous pouvrettés et nous estre tant
95favorable davoyr esgard en tout ce que
96dessus ; et nous prierons Dieu pour votre
97prosperité et grandeur. Et sur ce, ferons
98fin ; après avoyr salué vous bonnes
99graces par nous humbles recommandations,
100en priant le Créateur,
101Monsieur, en parfaicte senté, vous donner
102longue heureuse et contente vie. De Saint
103André, ce XVIIIme decembre 1573.
104Votres bons et humbles serviteurs,
105les consulz de St André
106et par commandement dyceulx,
107Allamand not[aire]